51 -SYLVE LA ROUSSE -I
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Elle entre comme chaque jour, pousse brusquement la porte, traverse la salle en faisant claquer ses hauts talons sans un regard pour les hommes attablés.
Celui qui abattait sa carte d’atout, une Reine de Cœur, murmure « pour la Rousse »
Elle s’arrête devant le bar, « Léon, un café, tu seras un ange » sa voix est un peu voilée, douce.
Puis brusquement elle se retourne, le dos au comptoir, sa tasse à la main, et de ses yeux un peu étranges, elle parcourt la salle.
Lentement.
Elle sait que sa tignasse auburn, son teint clair parsemé de tâches légères, et ses yeux verts, étonnent les femmes, troublent un peu les hommes.
Elle prend son temps, boit lentement à petit gorgées, avec une certaine délectation., en passant sur ses lèvres une langue rose.
Elle remarque au fond, un garçon blond, il a un Leica à la main et fait mine de la photographier lorsque son regard passe sur lui.
Aussitôt elle tourne le dos, pose sa tasse, sourit à Léon et repart de son pas insolent qui fait tressauter ses boucles, descend d’un bond les trois marches de l’entrée et traverse la rue en conquérante :
Elle est Sylve la Rousse.
O.
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Il a suffit qu’elle entre dans le petit bistrot un peu cafardeux du gris du quartier, des néons toujours allumés, des petits blancs ternes des jours après jours…
Elle n’avait pas abrité sa féminité de la sempiternelle pluie parisienne, et ses cheveux de sang et d’or dansaient en ressors autour de son petit visage fin, femme; fermé sur son intime.
Un visage blanc aux yeux d’ambre, qui pouvaient quelques fois s’alourdir de violets; comme des coups de poings à l‘âme.
Mais ça personne ici ne le savait: c’était la première fois qu’elle entrait dans ce bar… tous les habitués l‘auraient juré!
Pour l’instant ses yeux ne regardaient personne. Elle claquait ses talons aiguille sur le sol encore couvert de sciure de bois; elle posait sa hanche gauche, souple, sur le haut tabouret du comptoir.
Un peu rauque sa voix au serveur: «Café s’il vous plaît».
C’était un soir six heures, et les attablés, les piliers du comptoir, rentraient ou partaient au boulot; à part les deux maigres là-bas, perdus dans l’alcool du verre jamais vide de leurs pauvres vies… à part un homme très brun, assis à une table au fond du café, qui dessinait sur un genre de grand carnet à spirales.
Il y eu un imperceptible silence au bruit des conversations, juste quand la main gantée de la jeune-fille portait la toute petite tasse blanche au vermillon maquillage de ses lèvres; bouche à peine entre ouverte.
Je crois bien, oui, je crois bien que même les brassées de vêtements fripés de pluie sur le balcon en face, en avaient oublié de dégouliner un instant sur le trottoir.
Ut
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